Jean-Gilbert Victor FIALIN, Duc de PERSIGNY
Victor Fialin est né à Saint-Germain-Lespinasse (Loire) le 11 janvier 1808. Il est le fils d'un officier de l'Empire sans fortune, il fait ses études au collège de Limoges, s'engage à dix-sept ans, et sort le premier de l'école de Saumur (1828). Lors de la révolution de 1830, il est de ceux qui soutiennent l'instauration d'une République, ce qui lui vaut d'être rayé des cadres de l'armée l'année suivante. Ainsi renvoyé de l’armée pour son républicanisme, il décide de monter à Paris
La lecture du Mémorial de Sainte-Hélène lui fait découvrir le bonapartisme auquel il adhère avec passion. Ayant quitté le service, il vient à Paris, y changea son nom de Fialin contre celui de vicomte de Persigny qui appartenait à sa famille, il se jette dans le journalisme, et embrasse la cause bonapartiste.
C'est en 1834 que Persigny rencontre Louis-Napoléon. Imprégné des idées bonapartistes qu'il a découvertes en lisant le Mémorial de Sainte-Hélène, il voit dans le neveu de l'Empereur l'homme capable de les incarner. Dès lors, Persigny, issu d'une famille de petite noblesse de robe appauvrie par la Révolution, se consacrera passionnément à bâtir pour Louis-Napoléon un destin national. Comploteur dans l'âme, il organise deux tentatives de coups d'Etat, en 1836 et 1840, qui échouent et envoient les complices en prison, d'où ils s'évadent.
A la seconde, Louis Napoléon Bonaparte est condamné à la prison à vie, Persigny à vingt ans. Enfermé à Doullens, il est libéré en 1846. A l'époque - Louis Napoléon qui s'est évadé vit en Angleterre -, le bonapartisme paraît mort et personne n'imagine que la restauration de l'Empire puisse avoir lieu, sauf Persigny qui, dès sa libération, confie à Emile de Girardin : « Ne voyez-vous pas que l'Empire est proche, qu'il est imminent et inévitable ? Dans un an, nous aurons leur place ! »
La révolution de 1848 constitue un tremplin que Persigny ne manque pas d'utiliser et, grâce à l'intense propagande qu'il organise, le prince est élu à l'Assemblée constituante de juin, avant d'accéder à la présidence de la République le 10 décembre.
" Je l'ai fait président contre son gré, je le ferai bien empereur malgré lui. " Et, de fait, le coup d'Etat auquel Persigny participe activement est la dernière étape avant l'instauration de l'Empire.
C'est l'impératrice Eugénie et la démocratisation conduite par le nouvel empereur qui mettront fin au parcours de cet homme peu commun, sans qui Louis-Napoléon n'aurait probablement jamais été Napoléon III. "L'impératrice est légitimiste ; le prince Napoléon est républicain ; Morny est orléaniste ; moi même, je suis socialiste ; il n'y a que Persigny qui soit bonapartiste, et il est fou", disait, paraît-il, Napoléon III. Cette boutade pourrait illustrer la carrière politique d'un homme resté fidèle envers et contre tout à celui qu'il a contribué à porter au pouvoir. Napoléon III lui en rendra grâce en le faisant ministre de l'intérieur (1852), puis sénateur, ambassadeur à Londres (1855-1859), avant de redevenir ministre de l'intérieur (1859-1863). Il avait été fait comte en 1852, lors de son mariage avec la fille du prince de la Moskowa (le maréchal Ney). Persigny se distinguait, parmi les serviteurs du second Empire, par un dévouement absolu à Napoléon III, dont il était depuis longtemps l'ami personnel. Lors de la préparation des élections du 31 mai 1860, il reprend le procédé de la candidature officielle et multiplie pressions et maladresses. Les élections ayant été un échec pour le gouvernement, l'Empereur le démet de ses fonctions, tout en le nommant duc.
Il fut cependant disgracié en 1863, sur l'insistance de l'impératrice Eugénie, laquelle ne lui pardonnait pas d'avoir combattu son mariage avec NAPOLEON III. C’est une disgrâce dorée, mais disgrâce tout de même, puisqu'il quitte le gouvernement. Il devient ensuite sénateur, puis maire de Chamarande en Seine-et-Marne, où il a acheté en 1858 le château du dernier marquis de TALARU. Il est créé 1er duc de Persigny, par titre héréditaire (NAPOLEON III ne créa que 4 titres de duc pendant son règne), conféré en vertu du décret du 9 novembre 1863, et confirmé par lettres patentes datées de Saint-Cloud, du 7 novembre de la même année portant règlement d’armoiries : Ecartelé, aux 1 et 4 d'azur semé d'aigles au vol abaissé d'or empiétant sur un foudre du même; aux 2 et 3 d'argent à la bande d'azur, chargée de 3 coquilles d'argent (les dates de ces textes diffèrent selon les sources). Ce titre fut le seul régulier que PERSIGNY ait porté.
En 1862, il avait fondé à Montbrison la Diana, société historique et archéologique du Forez, dont il est le président, et qui aura pour mission de rassembler tous les ouvrages et documents concernant l’histoire de la province. La société historique s’installe dans la salle dont elle porte le nom, achetée par la ville de Montbrison à l’initiative de PERSIGNY qui avance l’argent nécessaire, et restaurée entre 1862 et 1866. Passionné d’histoire, il publie peu après une étude sur les blasons du Forez. Président du Conseil Général de la Loire, il se rend souvent dans son département où son œuvre économique est importante (creusement du canal du Forez, développement du réseau ferroviaire,…). Il préside en 1864 à Roanne, l’inauguration de l’église Notre-Dame-des-Victoires et fait obtenir à cette ville une Chambre de Commerce. Il est aussi à l’origine de l’obtention par la ville de la croix de la Légion d’Honneur. Il permet en outre à la ville de Roanne de récupérer, par décret, les archives du duché de Roannais, actuellement conservées à la médiathèque municipale.
En 1870, la guerre et la chute de Sedan provoquant la chute de l’Empire, il gagne Londres avec ses enfants, pendant que sa femme poursuit une aventure en Egypte. Définitivement brouillé avec l’impératrice, il ne reverra pas Louis-Napoléon lorsque celui-ci, libéré après Sedan, gagne à son tour l’Angleterre. En 1871, il rentre à Chamarande.
A demi paralysé par une attaque d’apoplexie, il vend son château de Chamarande, et part à Nice, où il meurt dans une grande solitude, le 12 janvier 1872, à 21h00, à l’hôtel du Luxembourg (actuel hôtel Méridien), sur la Promenade des Anglais (voir son acte de décès). Le lendemain de sa mort, une lettre de NAPOLEON III arrivait en lui souhaitant un prompt rétablissement.
D’abord déposé dans une église de Nice, son corps est inhumé à Saint-Germain Lespinasse, son village natal, en août 1872, en présence de son fils Jean, deuxième duc de PERSIGNY, et de sa file Lyonnette, sa femme étant déjà repartie en Egypte.
Homme courageux, assumant et revendiquant même tout l’héritage de l’Empire, y compris celui du coup d’état du 2 décembre, après cette vie aventureuse, et malgré sa disgrâce, il ne renia jamais son prince, et eut l’amertume d’assister à la fin du rêve pour lequel il avait vécu et combattu.